La présente décision concerne la situation dite à « priorité partielle » dans laquelle, pour une même invention, une revendication comprenant plusieurs alternatives (dite revendication de type « OU ») se voit attribuer plusieurs dates de priorité, par exemple une date de priorité par alternative.
Cette situation apparaît lorsqu’un premier document divulgue un élément A et qu’un deuxième document, déposé ultérieurement au premier et dont la priorité est aussi revendiquée, divulgue un élément B, non divulgué dans le premier document et utilisé en tant qu’alternative à l’élément A. Alors, une revendication de type « OU », faisant par exemple partie du deuxième document, ou d’une divisionnaire issue du deuxième document, portant sur l’objet « A ou B » peut bénéficier de la date de dépôt du premier document pour l’alternative A et de la date de dépôt du deuxième document pour l’alternative B.
Cette situation complexe est pour autant fréquemment rencontrée. En effet, elle peut être observée dès lors que l’invention connaît des développements dans la période de douze mois suivant le dépôt du document de priorité, et qu’il est de l’intérêt du demandeur d’introduire l’objet de ces développements dans le deuxième document, de sorte à bénéficier de la date de priorité pour les éléments communs aux deux documents. De la sorte, toute divulgation ayant eu lieu entre le dépôt du premier document et le dépôt du deuxième document, divulgation que pourrait constituer le premier document lui-même, ne peut être opposée aux éléments communs aux deux documents.
La principale question posée à la Grande Chambre de Recours vise à déterminer si le bénéfice d’une priorité partielle pour une revendication de type « OU » doit être refusé s’il n’est pas satisfait à une condition selon laquelle l’objet « A ou B » doit avoir été divulgué pour la première fois, directement, ou au moins implicitement, sans ambiguïté et de manière suffisante dans le document de priorité
Cette question émane d’une divergence jurisprudentielle liée à l’interprétation qui a été faite du passage de la décision G2/98 selon laquelle l’utilisation d’une revendication de type « OU » pour laquelle des priorités multiples sont revendiquées est parfaitement acceptable à condition qu’elle conduise à revendiquer un nombre limité d’objets alternatifs clairement définis.
La réponse de la Grande Chambre est sans équivoque : NON, la condition énoncée ci-dessus ne peut être interprétée comme impliquant une limitation supplémentaire du droit de priorité. Dès lors, hormis certaines conditions de forme, la seule condition de fond à remplir pour qu’une revendication de priorité soit valable est qu’il s’agisse de la même invention.
Cette réponse est donc favorable aux titulaires, en ce sens que la décision G2/98 ne devrait plus être interprétée à l’avenir comme limitant l’accès au bénéfice de la priorité partielle pour les titulaires.
En outre, la Grande Chambre rappelle que l’évaluation du critère de « même invention » pour ce qui est de la validité du droit de priorité est défini de façon consistante et par une jurisprudence constante comme consistant à évaluer si l’homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l’objet revendiqué à partir du document de priorité considéré dans son ensemble. Aucune condition additionnelle n’est requise.
En corollaire, cette décision ne semble pas impacter le mécanisme des demandes divisionnaires empoisonnées (Article à paraître).