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BREVET UNITAIRE : L’EUROPE DES BREVETS FRANCHIT UN CAP

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BREVET UNITAIRE

Sur le terrain des brevets, on retiendra du début de l’année 2022 une grande avancée en ce qui concerne le brevet européen à effet unitaire et la juridiction unitaire du brevet (JUB). L’office européen des brevets anticipe une ratification de l’Allemagne dans les prochains mois, possiblement dès le mois de mai, ouvrant la voie à une entrée en vigueur de ce système en fin d’année ou au début de l’année 2023.

Cette nouvelle n’est pas anodine car la construction d’un dispositif légal de brevet unitaire en Europe était devenue un véritable serpent de mer depuis l’initiation d’un projet de règlement sur un brevet communautaire au début des années 70. Les obstacles ont été nombreux : réticence des états européens à abandonner leur langue nationale dans une large partie des procédures de brevets, appréhension dans la transmission du pouvoir en matière de brevet du juge national à une autorité européenne, sans oublier l’épisode du Brexit. Mais, au prix d’un montage juridique complexe, un grand nombre d’états (avec l’exception notable de l’Espagne) ont fini par s’entendre.

Le nouveau système comprend un volet lié à la délivrance de brevets à effet unitaire et un second volet judiciaire, avec l’instauration d’une juridiction unifiée en matière de brevet.

Le brevet à effet unitaire

Ce brevet unitaire permettra de résoudre des inconvénients du système actuel. Le brevet européen que nous connaissons comprend une phase procédurale unique jusqu’à la délivrance du brevet et une procédure d’opposition unique. Mais des exigences nationales persistent après la délivrance engendrant une mosaïque de droits nationaux sur le support du brevet européen délivré, avec des annuités payables dans chaque pays et des contraintes de traduction dans un grand nombre de cas.

Le brevet unitaire couvrira les 17 pays suivants lors de son entrée en vigueur : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, la France, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, le Portugal, la Slovénie et la Suède. Une extension de ce territoire à prévoir au fur et à mesure des ratifications d’autres états.

Les règles de l’effet unitaire à venir limiteront les exigences, et donc les frais, de traduction. De même, les annuités seront centralisées auprès de l’office européen des brevets évitant l’éclatement des paiements dans les différents territoires à couvrir. C’est aussi le cas pour le registre des brevets, également centralisé auprès de l’office européen des brevets dans le nouveau dispositif. L’office européen des brevets anticipe que ces modalités réduiront le coût du brevet, pour ces 17 pays, à ce que l’on connaît actuellement pour les quatre plus populaires d’entre eux.

La juridiction unifiée du brevet

L’harmonisation européenne est aussi d’ordre judiciaire. La juridiction unifiée du brevet (JUB) constitue une juridiction internationale pour apprécier la validité des brevets unitaires et des brevets européens. 25 états membres y participent avec une organisation relativement complexe de Divisions locales, régionales et centrales et une Cour d’appel unique à Luxembourg.

En concentrant le contentieux et en spécialisant les juges, on peut espérer un rapprochement des jurisprudences et une démarche centralisée en cas de contentieux. Les durées de procédure annoncées sont par ailleurs réduites et les dommages et intérêts de contrefaçon couvriront tout le territoire de la JUB. Les prochaines années nous diront si ces avantages surpassent les inconvénients comme le principe de justice payante (il y aura des taxes à payer pour initier un procès, mécanisme qui n’est pas dans l’habitude française), le risque centralisé de l’aléa judiciaire ou encore la relative complexité de la procédure.

Stratégie : un nouvel outil, de nouvelles opportunités

Le brevet unitaire et la JUB ne signifient pas l’abandon des mécanismes existants. Les brevets nationaux, à l’instar du brevet français, perdureront, tout autant que la compétence des juges nationaux pour de tels brevets. De même, les brevets européens que nous connaissons continueront à être délivrés et pourront faire l’objet de validations nationales, notamment pour les pays ne participant pas au système unitaire.

Également, les demandeurs et les titulaires de brevets européens pourront sortir de la compétence de la JUB sur requête dans une phase dite «opt-out ».

Par conséquent, de plus larges possibilités de protection par brevet seront offertes aux entreprises dans les mois qui viennent.

Pour les PME et les start-ups, le brevet unitaire pourrait être l’opportunité d’obtenir un territoire de protection plus large à budget équivalent, signe d’une plus grande valorisation de leurs portefeuilles de brevets auprès des investisseurs ou des banques notamment.

Pour les grands comptes, les gestions de portefeuilles feront sans doute l’effort de différencier les titres pour appliquer différentes stratégies passant ou non par le brevet unitaire et/ou la juridiction unifiée du brevet.

Dans tous les cas, toutes les entreprises doivent se préparer dès à présent et adapter leurs stratégies de brevets. C’est particulièrement opportun pour la décision d’opt-out pour laquelle la fenêtre de tir sera courte.

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