Le volet de la loi PACTE relatif à la propriété industrielle comporte plusieurs dispositions d’importance, comme la demande de brevet provisoire relatée récemment sur notre site web.
L’instauration d’une procédure d’opposition aux brevets français fraichement délivrés est un autre aspect très significatif.
Une opposition, pour quoi faire ?
Le brevet français est délivré à l’issue d’un examen de forme et de fond. Il est ici rappelé que la loi PACTE impose aussi dorénavant une évaluation de l’activité inventive par l’INPI. Malgré cet examen poussé, les tiers conservent la capacité de contester la validité du brevet délivré. C’est souvent l’opportunité d’invoquer des antériorités non détectées en examen par l’INPI. Jusqu’alors, cette contestation était purement de nature judiciaire, de la compétence exclusive du Tribunal de Grande Instance de Paris.
Les inconvénients de l’action judiciaire en nullité de brevet sont significatifs. La démonstration d’un intérêt à agir est imposée pour le demandeur en nullité. Le budget peut être relativement élevé, la machine judiciaire étant lourde.
Même s’il est trop tôt pour évaluer finement le calendrier de la toute nouvelle procédure d’opposition, gageons qu’elle sera plus expéditive que l’action en nullité et nettement moins couteuse. Et toute personne, hormis le titulaire du brevet lui-même, pourra faire opposition (y compris un homme de paille, ou un conseil en propriété industrielle qui n’aura pas à dévoiler le nom de son client).
L’opposition va donc probablement accroitre fortement le nombre de contestations de brevets français, par un biais plus simple et moins cher, alors que l’action judiciaire en nullité se rencontre très peu hors contentieux en contrefaçon au principal.
Aperçu des modalités pratiques
L’opposition est une procédure déjà rôdée à l’Office européen des brevets (nos mandataires européens ont une pratique régulière de cette procédure avec un taux de succès élevé) et le législateur français a eu le bon sens de s’inspirer fortement de la Convention sur le brevet européen sur ce sujet. Ainsi, le délai d’opposition sera également de 9 mois à compter de la délivrance et les motifs d’opposition seront similaires (conditions de brevetabilité, insuffisance de description, demande de brevet ayant été modifiée en conduisant à une extension de son objet au-delà du contenu initial de la demande). L’INPI instruira cette procédure avec son équipe d’examinateurs.
Même si tous les détails ne sont pas connus, une décision d’opposition sera rendue, pouvant conduire au rejet de l’opposition (maintien du brevet tel quel), ou à la révocation du brevet, ou encore au maintien du brevet sous forme modifiée (si le breveté consent à préciser l’objet revendiqué, par exemple pour se démarquer plus avant de l’art antérieur). Un appel de la décision sera ouvert, par la voie judiciaire.
Une certaine souplesse est prévue pour permettre à l’opposant et au breveté de chercher une entente. Cette faculté est originale en matière de brevet (elle n’existe pas à l’OEB) et s’inspire de la phase de cooling off telle que connue des praticiens du droit des marques de l’union européenne. Les parties pourront en effet solliciter une suspension de procédure dans l’espoir de trouver un arrangement. On peut imaginer une entente sur la portée de revendications modifiées, ou un accord de licence par exemple. Le retrait de l’opposition engendrera la clôture de cette dernière, sans pouvoirs pour l’INPI de poursuivre d’office.
Mêlant contentieux administratif, un possible anonymat de l’opposant et des ouvertures au dialogue, l’opposition sera un outil stratégique fort pour les entreprises.
Tirer profit de la procédure d’opposition
Inconvénient pour le titulaire du brevet, il est clair que l’opposition sera une arme d’agression facilitée pour ses concurrents. Mais sa défense sera aussi sans doute moins lourde que devant le TGI de Paris. La possibilité de modifier les revendications sera l’occasion pour le breveté de tenir compte des arguments et antériorités administrés par l’opposant, et de préserver sa protection sur un fondement plus solide. Maintenu après opposition, un brevet sera très renforcé.
Pour l’opposant, il sera plus facile de contester les brevets des tiers. Une mise à jour régulière des informations relatives aux demandes de brevet des concurrents sera plus que précieuse pour ne pas rater la fenêtre d’opposition (9 mois à compter de la délivrance). Cela concerne les brevets français délivrés depuis le 1er avril 2020.
En conséquence, nous conseillons de mettre en place ou de renforcer les veilles brevets pour détecter les délivrances de brevet français pouvant impacter l’activité de l’entreprise.
Offrir une procédure d’opposition, une démarche qualité pour les brevets français
Beaucoup de dispositions de la loi PACTE portant sur les brevets visent clairement à accroitre la présomption de validité des titres en France. Avec l’examen de l’activité inventive, l’opposition en est une pièce fondamentale. Nous serons attentifs dans les mois qui viennent pour vous conseiller au mieux sur la mise en place de ces nouvelles mesures pour lesquelles nous n’avons actuellement aucun recul, mais qui, si elles sont efficacement appliquées, pourraient augmenter fortement la valorisation des brevets français.
Veilles brevets et opposition : nous sommes à votre disposition pour adapter votre stratégie brevets à l’une de ces nouvelles mesures de la loi PACTE. A la fois Conseils en propriété industrielle pour la France et mandataires agréés à l’OEB où l’opposition existe déjà, notre expertise croisé sera un atout pour nos clients, tant en attaque qu’en défense.